Interventions de Marie-Christine Dalloz le jeudi 13/11
sur le PLF 2013 (Projet de Loi de Finances)

Explications de vote

Mme la présidente. Dans les explications de vote, la parole est à Mme Marie-Christine Dalloz pour le groupe Union pour un Mouvement Populaire.


Mme Marie-Christine Dalloz. Je retiens que chaque fois que notre excellent collègue Hervé Mariton, qui a défendu avec beaucoup de conviction cette motion de rejet, a parlé de matraquage fiscal, le rapporteur général s’est époumoné et a contesté.
Monsieur le rapporteur général, vous admettrez que dix milliards pris sur les ménages et dix milliards pris sur les entreprises, ce ne peut être que du matraquage fiscal ! Aussi, la motion agrée l’ensemble des membres du groupe UMP, et nous la voterons avec conviction car ce projet de loi de finances pour 2013 est un très mauvais signe pour l’économie et pour l’ensemble des ménages français.


(Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.)
(La motion de rejet préalable, mise aux voix, n’est pas adoptée.)


Discussion générale


Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.


Mme Marie-Christine Dalloz. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, suite au rejet de la première partie de ce texte par le Sénat et à l’échec de la commission mixte paritaire la semaine dernière, le projet de loi de finances revient à l’Assemblée nationale pour une nouvelle lecture.


Alors que les défaillances de sociétés de plus de 250 salariés ont progressé de 34 % en 2012 et que les faillites d’entreprises connaissent une augmentation de 5 %, vous allez encore aggraver cette situation alarmante avec un matraquage fiscal sur l’économie française, puisque ce projet de loi de finances pour 2013 prévoit 10 milliards d’euros de taxes supplémentaires sur nos entreprises.


Parallèlement, nous venons d’achever la discussion du collectif 2012, qui prévoit l’instauration du crédit d’impôt compétitivité-emploi. Nous sommes donc en droit de nous interroger, ou plutôt de vous interroger, monsieur le ministre : où est le curseur de la logique socialiste ? Suite au rapport Gallois, vous admettez que notre industrie est confrontée au défi de la compétitivité : c’est une avancée que je note avec satisfaction. Cependant, quand vous traitez un problème urgent et crucial en faisant adopter fin 2012 une disposition dont l’effet attendu se concrétisera en 2014, vous comprendrez que nous puissions nous interroger sur la cohérence de votre politique économique.


Faisons les calculs correctement: vous imposerez 10 milliards d’euros d’impôts supplémentaires aux entreprises en 2013, puis 10 milliards d’euros en 2014 car il n’y a pas de raison que ce montant diminue l’année suivante, et vous instaurerez un crédit d’impôt compétitivité-emploi à hauteur de 12 milliards d’euros en 2014.
Sauf que, sur ces 12 milliards d’euros, vous fléchez un milliard sur les emplois d’avenir. On ne comprend plus rien du tout à la cohérence du collectif budgétaire !


La vraie question qu’il faut se poser est la suivante : que va-t-il se passer pour nos entreprises en 2013 ? La réponse figure, naturellement, dans votre projet de budget pour 2013 : 10 milliards de charges supplémentaires. J’ai préparé un inventaire des nouvelles dispositions que vous souhaitez adopter dans ce projet de budget.


D’abord, la modification du calcul de la quote-part pour frais et charges sur les plus-values de cession des titres de participation. Vous modifiez non seulement le calcul, mais également l’assiette, avec la prise en compte des plus-values brutes et non plus des plus-values nettes comme auparavant. La recette attendue est de 2 milliards d’euros.


Ensuite, la limitation de la déductibilité des intérêts d’emprunt, qui ne sera possible qu’à hauteur de 85 % en 2012 et 75 % en 2013. Avec cette disposition, vous attendez une recette supplémentaire de 4 milliards d’euros, ce qui représente 10 % des recettes nettes de l’impôt sur les sociétés dès le début de l’année 2013. Voilà le choc fiscal et financier que les entreprises devront surmonter !


Troisième disposition : l’aménagement du mécanisme de report en avant des déficits des entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés.


Quatrième disposition : la taxation des sommes placées en réserve de capitalisation des entreprises d’assurance.


Enfin, vous prévoyez la modification du régime des acomptes d’impôt sur les sociétés applicable aux grands groupes.


Après cet inventaire qui provoquera un choc fiscal sans précédent, je soulignerai l’incohérence entre cette pression fiscale nouvelle et urgente et le vote d’un crédit d’impôt compétitivité-emploi à échéance 2014. En matière fiscale, les bonnes intentions et l’affichage politique ne constituent pas des réponses concrètes à la crise économique. Notre pays compte 1 500 demandeurs d’emplois supplémentaires par jour : c’est une réalité, et cela correspond certainement à un échec de votre politique économique. Le taux de chômage en Allemagne est de 6,5 %, alors que les conditions économiques internationales sont identiques. On voit toute la différence entre le laxisme et le volontarisme politique !


Après l’impact fiscal de votre projet de loi de finances pour 2013 sur les entreprises, je vous propose l’inventaire des mesures fiscales qui concerneront les ménages. Là aussi, les chiffres sont édifiants. 10 milliards d’euros : c’est le tarif à payer, pour tout le monde, en 2013.


C’est d’abord le gel du barème de l’impôt sur le revenu, qui représente concrètement une augmentation de la pression fiscale de 2 % pour l’ensemble des ménages, à l’exception des deux premières tranches pour lesquelles vous avez institué un dispositif d’exonération.


C’est ensuite la création d’une tranche d’impôt sur le revenu à 45 % pour les revenus supérieurs à 150 000 euros par part.


C’est aussi l’abaissement du plafond de l’avantage procuré par le quotient familial. À mon sens, cette mesure est plus grave : la réduction d’impôt plafonnée à 2 000 euros n’est pas un encouragement à la politique familiale. Si l’on regarde la situation de près, le taux de natalité se situe aujourd’hui à 2,1 en France, contre 1,34 en Allemagne, ce qui représentera à l’avenir pour ce pays un vrai problème démographique, avec des conséquences lourdes sur l’économie à une échéance de dix ans. N’appliquons pas aujourd'hui les mesures qui n’ont pas fait recette dans les autres pays de la zone euro !


Enfin, c’est l’alignement de la fiscalité du capital sur la fiscalité du travail. Au sujet de l’article 6, qui fait l’objet d’une réécriture en séance, je rappelle la contestation des « pigeons ».


Malgré le semblant de marche arrière du Gouvernement, le cumul absurde des conditions nécessaires au maintien du prélèvement forfaitaire libératoire à 19% est une illusion qui ne devrait tromper personne.


Autre mesure, à l’article 8, la création d’une contribution exceptionnelle de solidarité sur les très hauts revenus, avec la taxe à 75 %, qui incitera à l’exil fiscal, nous en avons eu un exemple fameux cette semaine.


À l’article 9, on trouve le rétablissement du barème de l’impôt sur la fortune avec la mise en place d’un bouclier fiscal « façon socialiste » – car il est interdit de parler de « bouclier fiscal » ! –, pourtant, c’est bien de cela qu’il s’agit !


L’article 12 prévoit la prolongation et le durcissement du malus automobile. C’est un très mauvais signe pour l’industrie automobile française.


Enfin, le projet de loi de finances pour 2013 plafonne les niches fiscales à     10 000 euros au lieu de 18 000 précédemment. Il maintient cependant les avantages fiscaux liés à l’outre-mer, au dispositif Malraux et à la niche Sofica en faveur du cinéma.


En revanche, vous pénalisez lourdement les contribuables employeurs dans le domaine de la garde d’enfants ou des services à la personne. Les pénaliser n’est pas une mesure de justice, monsieur le ministre. Face au manque cruel de places de crèches, les parents qui travaillent n’ont pas toujours le choix. Pénaliser ces familles n’est juste ni fiscalement ni socialement.


La conséquence directe de votre projet de loi de finances, c’est un taux de prélèvements obligatoires record : 46,3 % du produit intérieur brut !

Quant à la baisse des dépenses de l’État, elle est un leurre, au mieux un artifice. Il s’agit en fait d’une moindre progression des dépenses, mais ce n’est pas ce que j’appelle une réelle diminution.


À titre de comparaison, le seul projet de loi de finances qui avait marqué une vraie rupture en inscrivant une diminution stricte de 250 millions d’euros de dépenses dans le budget général, c’était le projet de 2012, adopté par l’ancienne majorité.


C’est la réalité, chers collègues. La non-maîtrise des dépenses induit un ratio de 56,3 % de part de dépenses publiques dans le produit intérieur brut. En Allemagne, il se situe à 45 %.


Quant aux amendements, vous avez fait preuve d’une grande générosité en acceptant un amendement du groupe UMP prévoyant un rapport sur le rétablissement de l’ISF.


Ce projet de loi de finances n’apporte aucune réponse structurelle pour remédier aux faiblesses de notre économie en matière de réduction de la dépense publique ou d’amélioration de la compétitivité de nos entreprises.

Alors que l’assemblée vient d’adopter le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi dans le cadre du collectif budgétaire, on comprend mal la stratégie du Gouvernement vis-à-vis des entreprises : ce qu’il leur donne d’une main, il leur reprend de l’autre avec un ensemble de mesures alourdissant considérablement leurs charges et entraînant une instabilité fiscale sans précédent, qui inquiète les entreprises et l’ensemble de nos concitoyens.
(Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP).